Prière d’un évêque

Guy-Marie Riobé

  • Photo 0 (intro) à mettre à gauche
    “Souffrir dans la ville, espérer dans la ville, prier dans la ville: n’est-ce pas l’essentiel de
    ma mission d’évêque ?” (Revue Carmel 1977)
  • 1-Enfants Riobé
  • Photo 1 Porte oratoire
    Guy-Marie Riobé se retirait souvent dans l’oratoire qu’il avait installé à l’étage de l’évêché.
    Sur la porte, le coeur et la croix de l’habit de Charles de Foucauld.
    Nommé responsable des Fraternités sacerdotales de Charles de Foucauld en 1955, il a
    contribué à leur développement et tissé des liens forts dans plusieurs pays d’Afrique et
    d’Amérique latine. Des liens qu’ii gardera tout au long de sa vie.
  • 1-Enfants Riobé
  • Photo 2 Charles de Foucauld
    Au coeur de la vie des « petits frères de Jésus », la prière d’abandon du « frère
    universel », canonisé en 2022 par le pape François :

    Mon Père, je m’abandonne à toi,
    fais de moi ce qu’il te plaira.
    Quoi que tu fasses de moi, je te remercie.
    Je suis prêt à tout, j’accepte tout.
    Pourvu que ta volonté se fasse en moi,
    en toutes tes créatures,
    je ne désire rien d’autre, mon Dieu.

    Je remets mon âme entre tes mains.
    Je te la donne, mon Dieu, avec tout l’amour de mon cœur,
    parce que je t’aime,
    et que ce m’est un besoin d’amour de me donner,
    de me remettre entre tes mains, sans mesure,
    avec une infinie confiance
    car tu es mon Père.

  • 1-Enfants Riobé
  • Photo 3 Intérieur de l’oratoire de l’évêché
    Guy-Marie Riobé aimait à prier le chapelet.
    Il prenait de longs temps de désert personnel régulièrement, notamment avant ses prises
    de parole publiques.
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  • Photo 4 La ville. (À trouver !)
    Prier dans la ville Témoignage de l’évêque d’Orléans pour la revue Carmel (1977, n°4)
    Un évêque dans la ville

    Il m’arrive parfois d’errer dans la ville, de parcourir les rues de la cité. Il est souvent tard le
    soir, lorsque je reviens d’une réunion, ou après une visite à des malades, ou encore quand
    j’ai partagé la table d’un foyer ami.
    Je regarde la ville du haut d’un huitième étage, ou dans les allées et venues d’un quartier
    populeux où se mêlent, anonymes, Portugais, Espagnols, Turcs, Arabes et Yougoslaves.
    Je laisse retentir dans ma conscience – ce creuset où la foi devient vie, où
    l’espérance mûrit, où la charité se réalise – les hantises et les ferveurs de tout un
    peuple.
    Hantises qui me bousculent : tant de bouleversements quotidiens où meurent les
    structures d’une société, d’une mentalité … jusqu’aux violences qui mutilent et aliènent les
    hommes comme l’expression la plus scandaleuse de ce que nous appelons le péché du
    monde.
    Les tout premiers évêques portaient le titre de « défenseurs de la cité ». Le combat
    n’est plus le même. Je n’ai pas à défendre une civilisation, mais je sais que mon rôle
    est d’inciter les chrétiens, dans la fidélité de l’Evangile, à se montrer attentifs et
    inventifs pour découvrir les formes nouvelles de la société de demain.
    C’est alors que je m’efforce de rejoindre le regard de Jésus sur l’existence des hommes,
    ce regard dont l’Evangile nous parle si souvent, quand « la ville entière se pressait devant
    sa porte » (Mc 1,33).

    Je crois que le Christ est capable de rejoindre tous les hommes au plus profond d’eux-
    mêmes, parce qu’Il s’est fait semblable aux plus petits, aux plus pauvres, aux plus

    démunis d’entre eux. Jésus n’est pas en face de l’homme, et au-dessus de lui; Il est
    dedans.
    Mais comment rendre Jésus-Christ nouveau pour les hommes ? Etre évêque
    aujourd’hui, c’est être appelé à marcher vers Dieu dans l’itinéraire des hommes, à
    faire route avec tous ceux dont notre Eglise est parfois si loin, mais qui cherchent
    avec droiture.
    Et les ferveurs de l’humanité prennent le pas sur les hantises. La crise actuelle libère
    beaucoup d’espérance active. Aujourd’hui, dans tous les secteurs de la vie sociale et
    politique, que de témoignages de vie évangélique, de foi vivante, à tous les âges de la vie,
    et particulièrement chez les jeunes!
    Je crois que l’Esprit de Dieu est à l’œuvre dans les fermentations qui nous étonnent.
    Là où les hommes sont ensemble pour qu’il y ait un peu plus de justice et d’amour
    fraternel sur les chantiers du monde, le Christ se forme. Et là où le Christ se forme,
    là est l’Eglise !
    Oui, au cœur de la ville, il y a Quelqu’un, c’est le Christ, une Personne. Et ce Quelqu’un, à
    travers le temps et l’espace, ne cesse de rencontrer des personnes vivantes, à la fois
    uniques et unies par les souffrances, les luttes et les créations de l’histoire.
    Il est urgent que les exigences de l’Eglise, à la fois s’intériorisent en vie profonde et
    s’incarnent dans le service des hommes, dans l’invention de formes nouvelles de vie
    collective et de culture.
    Dans un monde sécularisé si souvent dur et froid, nous avons besoin de petites flammes
    allumées un peu partout.
    Souffrir dans la ville, espérer dans la ville, prier dans la ville: n’est-ce pas l’essentiel
    de ma mission d’évêque?
    Que de fois, le cœur lourd de toutes les interrogations de mes frères avides de bonheur et
    de paix, pressé de dénoncer les impasses où l’on engage les hommes, tenté de baisser
    les bras devant tant de problèmes de logement, de communication, de salaire familial, de
    chômage des jeunes, d’accueil des émigrés, de solitude des vieil­lards, de souffrance des
    malades et des handicapés … que de fois, seul avec Jésus dans le petit oratoire qui

    rejoint mon bureau de travail, je me prends à murmurer, comme la Vierge à l’Annonciation:
    « Comment cela se fera-t-il ? »
    J’essaie alors de faire silence, et d’écouter, et d’adorer.
    « Ne crains pas, l’Esprit Saint viendra ! »
    Oh! oui Seigneur,
    Répands ton Esprit sur les maisons des hommes, sur la ville des hommes, sur le monde
    des hommes, sur tous les hommes de bonne volonté.
    Envoie ton souffle sur tous ceux qui bâtissent l’avenir, sur ceux qui sauvegardent le bien,
    sur ceux qui préservent la vie, sur ceux qui créent de la beauté.
    Il me semble ainsi conduire la ville, la ville tout entière, cette cité dont je suis le
    « défenseur », à cette Assomption universelle, quand le Christ « remettra son pouvoir
    royal à Dieu le Père, après avoir détruit toutes les puissances du mal » (l Co 15,23).

    Ici et maintenant,
    Sur nous, Seigneur,
    Répands ton Esprit !

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